La force que met l’archer tout au long de l’armement est « stockée » dans l’arc et sera restituée partiellement à la flèche lors du tir. Toutefois, une certaine partie sera « perdue » par le déplacement des branches de l’arc (déplacement de matière).
Il va de soi qu’un arc performant perdra le moins possible d’énergie lors du tir afin d’en restituer le maximum à la flèche. Un arc qui aurait stocké beaucoup d’énergie ne sera pas performant s’il en restitue peu à la flèche !

 

PRINCIPE 1 – Plus un arc est lourd, plus il perd d’énergie lors du tir

Il convient de limiter l’énergie « perdue » lors du tir en limitant la masse de l’arc.

Un arc de 50#@28 » fait environ 23 onces (650g), bien que cela varie beaucoup entre les longbows et les flatbows (poignée plus volumineuse, mais sans effet sur les performances de l’arc).
Chaque once (28g) ajoutée sur les branches fait diminuer la vitesse d’environ 1 fps (pied par seconde). Une perte de 1 fps correspond environ à une perte de 1 livre de puissance.
Un bon arc de 40# peut donc être aussi rapide qu’un mauvais arc de 60#.

Si deux arcs de formes identiques et de même puissance sont réalisés l’un en bois et l’autre composite, l’arc en bois sera toujours plus rapide ! Car le bois est environ deux fois plus léger que le tendon ou la corne. De même, ajouter du tendon sur un arc qui n’en a pas besoin le rendra plus lourd, donc moins performant. La masse volumique du matériau utilisé est donc importante.
Les arcs en aciers sont, par la même occasion, très peu performants. S’ils ont pu être utilisés sur des arbalètes, c’est uniquement car ils avaient des puissances extrêmes (parfois 1000#) et que des systèmes de moufle ou de cranequin permettaient de les armer. Les arbalètes en acier sont peu performantes proportionnellement à leur puissance. Un arc en bois de cette puissance aurait été bien plus performant (sauf que le bois ne peut pas tenir de telles contraintes).

 

PRINCIPE 2 – L’essence de bois a peu d’importance pour la vitesse de la flèche !

D’une manière générale, les bois denses sont plus résistants et élastiques, pour une puissance et longueur donnée, les arcs seront donc plus fins (moins de matière), tandis que les bois « légers » (peu denses) sont moins résistants et demanderont plus de matière pour arriver à une puissance donnée (arc plus volumineux).
La masse de l’arc variera donc peu selon l’essence de bois pour une puissance donnée.
Par contre, un bois dense sera préféré pour les arcs puissants afin de diminuer la taille des branches et de la poignée (plus confortable, paradoxe de l’archer plus limité).

Toutefois, certaines essences de bois ont un ratio résistance/masse volumique plus important et seront donc préférables. C’est le cas de l’if qui a une densité plutôt moyenne, mais qui est très élastique et résistant ou encore l’osage orange qui est dense, mais très résistant à la compression. Malgré tout, ces bois ne font gagner que quelques fps (pieds par seconde) de vitesse à la flèche, ce qui peut être négligeable dans le cas de tir de loisir.

 

PRINCIPE 3 – Les branches les plus étroites possible (sans suivi de corde).

nrj 2 a

Une poutre fléchie plus si elle est placée à plat que sur champ. En effet, la hauteur de la poutre donne plus de résistance à la flexion que sa largeur. Le principe est identique pour un arc : pour une masse identique, un arc épais sera plus puissant qu’un arc plat (flatbow).

Pour limiter le poids de l’arc, il est donc utile de le travailler avec une section de branche la moins large possible. Un arc de section carrée ou en D sera donc plus léger qu’un flatbow qu’une puissance identique.

Par contre, nous verrons qu’une section aplatie permet de réduire les contraintes dans le bois, ce qui diminue le suivi de corde et permet de diminuer la longueur de l’arc. Ces deux caractéristiques annulent dès lors l’avantage de la section du longbow.
Pour résumer, selon l’essence utilisée, il sera utile de trouver la largeur de branche minimale, MAIS qui évite le suivi de corde.

 

PRINCIPE 4 – Plus la masse est proche des extrémités, plus perte de vitesse.

Si un forgeron prend une masse d’un kilo au bout d’un manche de 25cm, il frappera plus rapidement que si la même masse est placée sur un manche de 50cm. Le principe sera le même pour l’arc si l’on y ajoute un poids en plomb par exemple :
> 1 once placée aux poupées                           > perte de 7 fps (pieds par seconde)
> 1 once placée au milieu de la branche    > perte de 1 fps
> 1 once placée proche de la poignée         > Aucune perte.
La perte de vitesse de la flèche est donc exponentielle à la distance entre ce poids et le centre de l’arc. Du coup, la perte de vitesse sera moins importante pour les arcs courts que pour les arcs longs.

Ce principe est à la base du travail du facteur d’arc, car il implique de répartir les contraintes dans le bois tout au long de la branche afin d’en diminuer le poids au maximum. C’est ce qu’on appelle le « tillering » (ou l’équilibrage des branches). Il faudra donc s’approcher du tillering idéal afin de diminuer le poids de l’arc et d’en affiner les extrémités. (voir page suivante à ce sujet)

Ce principe a 2 autres conséquences directes :
> Il faut limiter au maximum le poids des poupées tout en évitant les risques de casse (éviter les cornettes trop volumineuses, surtout que la corne est plus lourde que le bois)
> Rechercher la section et la forme de branche qui limite au maximum les « poids morts ». (voir pages suivantes à ce sujet)

 

PRINCIPE 5 – L’arc de moyenne longueur est le plus rapide

L’arc court stocke moins d’énergie, mais la restitue mieux, tandis que l’arc long en stocke plus, mais en perd beaucoup plus lors du tir (masse des branches). L’arc le plus rapide se situe donc entre les deux.

Tim Baker a réalisé plusieurs arcs de 50#@28 » ayant le même suivi de corde (et sans courbure particulière) afin de découvrir quelle longueur serait idéale pour un arc :nrj3

La taille idéale d’un arc droit de 28″ d’allonge est de 66″ – 67″ (entre poupées)
Au-delà de cette longueur (67″), l’arc perd de sa rapidité assez rapidement et de manière plutôt constante selon sa grandeur. Alors que l’arc court ne perd presque pas de vitesse jusqu’à 2x l’allonge (56’’) et chute ensuite pour les arcs de moins de 56’’.
Beaucoup de facteurs d’arc considèrent que la taille minimale d’un arc est 2x son allonge, Tim Baker démontre donc le contraire, mais cela induit des arcs aux branches très fines et peu efficaces selon le test. Pour un longbow, 2x l’allonge c’est déjà de grands risques de casse.

Malgré tout, l’arc long est plus agréable à tirer, il a beaucoup moins de risque de suivi de corde ou de casse et est plus précis. L’arc court est toutefois plus maniable en foret. Ces tests ne tiennent pas compte du recurve ou de courbures particulières qui permettent aux arcs courts de gagner en efficacité.
Le choix d’une forme d’arc n’est pas uniquement question de vitesse de la flèche !
La taille idéale est aussi fonction de l’allonge de l’archer. Il faut ajouter ou retirer 2 pouces de longueur à l’arc pour chaque pouce d’allonge de différence :
24’’ > 1m50
26’’ > 1m60
28’’ > 1m70
30’’ > 1m80
32’’ > 1m90

Les tests de Tim Baker démontrent que l’essence utilisée ne modifie pas/peu les résultats. Toutefois, nous pouvons lui reprocher d’avoir fait varier plusieurs données lors de son test : l’essence de bois utilisée, mais aussi, il semble qu’il a utilisé des longbows pour les arcs les plus grands et des flatbows pour les plus petits (cela se voit avec le poids des arcs qui diminue vers 66-68’’). Cela se justifie malgré tout, car lorsque l’arc est court, les contraintes internes sont plus importantes, et seule une section de branche aplatie pourra résister, surtout sans trop de suivi de corde.

Si les tests avaient été réalisés avec des flatbows uniquement, il est probable que l’efficacité diminuerait encore plus vite au-delà des 67’’. Si le test avait été réalisé uniquement avec des longbows, le suivi de corde aurait alors certainement faussé les résultats pour les arcs plus courts (et les arcs inférieurs à 1m60 auraient certainement cassé).

 

PRINCIPE 6 – Plus la flèche est légère, plus l’énergie de l’arc lui est restituée

Le poids de la flèche est le premier facteur augmentant sa vitesse, mais a peu d’incidence sur la forme de l’arc.
Toutefois, un arc puissant sera plus approprié pour tirer une flèche lourde, un arc trop léger perdrait en effet beaucoup d’énergie à l’envoyer. Mais ceci influence surtout le choix de la puissance de l’arc. C’est pourquoi les longbows anglais devaient être très puissants pour envoyer des flèches très lourdes (pointe lourde en acier, fut en frêne).

On n’envoie pas une balle de baseball avec un club de golf… ni une balle de golf avec une batte ! C’est pourquoi la flèche doit être adaptée à l’arc et à l’archer (voir article à ce sujet).

 

PRINCIPE 7 – La masse et l’élasticité de la corde ont une certaine incidence

La flèche perd environ 1 pfs (pied par seconde) pour 20 grains (1,3 g) supplémentaires à la corde.

La masse de la corde à ces extrémités est peu significative (comme si elle était ajoutée aux poupées de l’arc), alors que la masse située au centre de la corde a une plus grande importance (comme si elle était ajoutée à la flèche).
Les renforts aux boucles de la corde ne diminuent pas la vitesse de la flèche, alors que des anneaux métalliques ou un large tranche-fil réduisent la vitesse de la flèche de manière plus significative.

L’élasticité de la corde absorbe énormément d’énergie également (une corde en nylon fait perde 10 fps à la flèche). Il est d’ailleurs préférable de tendre les cordes à la limite de leur résistance afin d’éliminer définitivement toute élasticité.

La corde idéale sera donc peu élastique et aura un ratio résistance/masse volumique intéressant :
> Fast flight & autres cordes contemporaines (les meilleurs, mais peu approprié à des arcs en bois, risque de casse de l’arc dû à un choc trop violent – pas du tout d’élasticité),
> Dacron (idéal pour les arcs traditionnel, mais moins « historique »)
> Lin, chanvre et ortie (très bon)
> Soie et tendon (bon)… Mais d’autres fibres végétales ou animales peuvent être utilisées (boyaux, cuir…)

(voir articles à ce sujet)

 

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Texte & schémas : Fabien Houssin

CC BY-NC-SA 4.0